Les sociétés humaines ont créé et adopté un système qui veut qu’à un certain âge ou après une certaine période de travail que l’on arrête de travailler: c’est la retraite. L’intérêt aurait été que cela soit moralement cohérent et satisfaisant avec un bénéfice non pas financier mais existentiel pour l’Être humain. Mais à bien d’égards il apparaît plutôt que la retraite est un tort, un fâcheux problème qui occasionne des maux dans nos sociétés.
Scènes de vie
La vie des retraités fait voir certaines scènes caractérisées par des comportements qui suscitent une forte inquiétude. Quand on demande à des personnes matures d’arrêter de travailler et de rester à la maison, on n’est malheureusement pas sûr d’être à l’abri d’incongruités, de vices, d’actes irresponsables.Il y a certains retraités qui décident de prendre une nouvelle femme qu’ils appellent leur épouse ou leur femme de la retraite, celle avec qui ils vont passer leur retraite. Avec cette nouvelle épouse ils vont offrir leur version de parodie de "Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants." Ces retraités qui n’ont pas forcément le temps de s’occuper de leurs enfants de la retraite et de les voir arriver à l’âge de la majorité avant leur désincarnation vont laisser derrière eux des problèmes. Pour ceux qui connaissent les problèmes de polygamie en Afrique et le type d’entente qui existe en général entre enfants consanguins, on imagine facilement la situation. On voit d’autres retraités désœuvrés qui se mettent à fréquenter des cabarets et des bars où ils se comportent comme des voyous en se livrant à des attouchements corporels osés sur des serveuses tout en disant des grivoiseries voire carrément des plaisanteries obscènes ponctuées de rires luxurieux de vicelards. Ces retraités-là qui pensent avoir une espèce de droit d’agir ainsi, supposément du fait de leur aînesse et du respect qu’on leur doit, se permettent le luxe malséant d’être vexés quand une serveuse ne leur tolère pas d’avoir les mains baladeuses. À l’occasion, il arrive que celles qui se laissent faire deviennent des amantes passagères de ces messieurs. Étant oisifs et n’ayant rien pour s’occuper certains parmi eux ont fait de l’alcool leur petit-déjeuner. Il y en a un comme ça qui dès le matin va s’asseoir dans n’importe quel bar, armé d’une pile de journaux qu’il entreprend de lire tout en picolant sa bière jusqu’à l’heure de la pause à laquelle il rentre à la maison, comme quelqu’un qui s’est rendu au service. On sent vraiment qu’il n’a pas envie de rester à la maison. Beaucoup de retraités, pour fuir l’oisiveté, j’imagine, deviennent des joueurs invétérés de jeux de hasard, le P.M.U. (Pari Mutuel Urbain) notamment. Franchement, d’après mon observation, ce n’est pas si tant le gain qui les préoccupe mais c’est pour s’occuper que certains sont joueurs. Vous pouvez les voir assis à une table en train de faire des calculs et des calculs; et ça leur donne cette sensation de faire un travail.
De façon générale, ce sont les hommes qui s’adonnent à l’alcool mais il arrive de rencontrer aussi des dames à la retraite qui se mettent de temps en temps à faire une petite expérience de l’état éthylique; ce n’est pas bien grave. Cela devient grave lorsque ces dames aussi contractent le syndrome du fond de bouteille (d’alcool). Les autres femmes retraitées qui ne prennent pas de l’alcool s’adonnent à "l’opium du peuple" qu’elles vont consommer jusqu’au fanatisme. Il y a d’autres femmes encore qui attrapent le vice des associations et veulent être membres de toutes les associations possibles. Ce qui les conduit à des agissements les plus irrationnels. «-Mais maman, c’est encore quoi ce nouveau pagne que tu es allée acheter?
-Ça, c’est le pagne de notre association des femmes de l’amicale des anciens lycéens du lycée Akaba. On veut porter ça pour aller remercier le Chef de l’État pour ce qu’il fait.
-Encore? Seigneur!»
Par manque de travail, d’autres retraitées encore deviennent des affaireuses, des colporteuses de ragots, ce que mes frères Ivoiriens appellent des kpakpatos.
Ce tour d’horizon montre que des vices comme l’alcoolisme, l’adultère, la débauche, l’addiction aux jeux de hasard naissent et/ou se développent dans la retraite. On se rend donc compte de l’existence d’une délinquance sénile due à l’oisiveté et l’ennui occasionnés par la retraite.
Situation difficile
Il n’est pas facile d’être à la retraite, sans travail, sans activité épanouissante, confiné à la maison dans l’oisiveté et ne pas tomber dans un vice. C’est pour cela que certains retraités finissent par faire des choses anormales et deviennent de véritables cas sociaux, insupportables et chiants. À noter aussi que la paresse est un vice. À force de ne plus travailler, on peut finir par devenir paresseux. C’est ainsi que vous voyez des gens qui vous appellent, vous qui êtes éloigné, pour venir leur prendre un gobelet posé à quelques centimètres d’eux.Il m’étonne que les autorités politico-administratives au plus haut niveau aient compris que la sédentarité constitue une situation favorable à la gestation et au développement de maladies d’autant plus ravageuses que l’âge est avancé et qu’au même moment ces autorités n’aient pas envisagé de revoir la retraite qui plonge bon nombre de retraités dans ladite sédentarité.
La cessation d’activité est une mort programmée qui peut s’observer même sur des machines. Laissez une machine au repos sans activité pendant un temps relativement prolongé (qui peut dépendre de la nature des machines) et vous verrez que cela a tendance à rendre la machine inutilisable. Je me rappelle que dans le temps où je travaillais dans une certaine structure, il y avait une imprimante obsolète (de fabrication et de modèle anciens) qu’on utilisait de temps en temps, histoire de la maintenir en vie. Quand il arrivait qu’on oublie de l’utiliser pendant un long moment, il fallait la démonter, la nettoyer et au besoin lui flanquer quelques claques -ça peut faire rire, je sais-, pour la faire remarcher. Vous voyez donc que la cessation d’activité n’est pas pour arranger les choses. Il est alors aisé de comprendre que l’état de santé des retraités se détériore par le fait d’une inactivité prolongée.
On peut se poser la question suivante: qu’est-ce que la retraite apporte à une société? Ce que les retraités ont à apporter à leur nation, on leur demande de cesser de l’apporter. Ce que la retraite aurait peut-être pu apporter, c’est de permettre de résorber le chômage des plus jeunes; les plus âgés partant à la retraite céderaient leurs postes à la jeunesse. Mais il n’est pas sûr que la retraite apporte cet avantage social à notre époque; il n’est pas sûr que la retraite ait jamais apporté un tel avantage même dans le passé. Je sais que ça ressemble plus à une supputation qu’à une démonstration car pour pouvoir affirmer cela avec plus d’assurance et de pertinence il aurait fallu avoir mené par exemple une étude comparée croisée du rythme des départs à la retraite et des recrutements par profession par année pendant environ une dizaine d’années, ne serait-ce que pour le secteur public, mais hélas je ne peux pas avoir les données pour une telle étude. Cependant ce qui peut donner foi à cette supputation c’est que le pouls du marché de l’emploi chez nous n’indique pas que le chômage baisse grâce aux départs à la retraite.
Quant au retraité lui-même, qu’apporte la retraite? Le malaise de l’inactivité et de l’oisiveté. L’autre aspect non réjouissant, c’est la pension de retraite inférieure à la rémunération perçue pendant le travail et on peut comprendre pourquoi. Voilà donc quelqu’un qui doit faire face à la baisse de son revenu sans que ses dépenses aient forcément diminué. Des retraités se retrouvent ainsi plongés dans une situation difficile. Ceux qui arrivent à se garantir une retraite paisible et dorée, comme ça se dit, sont souvent soit des gens qui ont un statut de fonctionnaire international, soit des gens qui ont trempé dans des affaires louches ou qui sont dans les arcanes du pouvoir.
Service reconçu
Mais que faut-il donc faire? D’abord il est clair et net que la retraite doit être abolie; c’est le moins qu’on puisse dire.Il m’est arrivé une fois de discuter avec un retraité qui s’est trouvé une nouvelle occupation lucrative à qui j’ai posé la question saugrenue -il faut le dire-, de savoir pourquoi en tant que retraité il ne veut pas se reposer. Il m’a répondu que lui il ne peut pas rester assis tout le temps à ne rien faire et de me demander à son tour: «Comment peut-on dire à un homme [valide] de ne plus travailler?». Cette question, je me veux d’en être le relai de communication auprès de vous ami lecteur. La question de ce retraité révèle le souhait de continuer à être en activité. Ici il est peut-être important de faire remarquer que la retraite se rapporte plus au monde salarié conventionnel -public et privé- qu’aux professions libérales. Cette remarque est faite à juste titre pour montrer la catégorie de personnes les plus concernées.
On nous a fait croire qu’il y a un âge auquel on doit cesser de travailler alors qu’il est dit: «Tu travailleras.» sans mention d’une limite d’âge où il faut arrêter de travailler. Mais il est intéressant de voir que dans le monde de plus en plus l’âge de départ à la retraite est remis en question avec une tendance à l’augmentation du temps de travail même si les raisons évoquées sont tout autre. C’est un élément qui interpelle davantage sur la question de la retraite.
Il est faux de penser que les personnes d’âge avancé ne peuvent plus servir; leur service doit plutôt être reconçu. À priori on ne peut pas exiger des personnes d’un âge avancé la même vigueur, la même assiduité, la même endurance au travail que des jouvenceaux. Je dis à priori car il y a des "vieux" à côté de qui des jeunes ne peuvent pas tenir, hein. Cela mérite d’être relevé.
Sans avoir mené une étude approfondie, la première idée qui m’est venue est celle de la redéfinition de l’exécution du travail dans laquelle il faudra réduire la durée de travail à cinq heures par jour pour les personnes ayant atteint l’âge qu’on dit être l’âge de la retraite. Arrivé à cet âge, le travailleur va passer en "mode retraite" avec adaptation des horaires de travail. Le personnel vieillissant aurait par ailleurs -selon ce mode- droit à un congé de deux mois, deux fois par an; ce qui reviendrait à deux quadrimestres de travail par an. Les conditions de travail, les tâches et missions devront également être revues de manière à favoriser une mobilité accrue avec notamment des rotations de postes de travail.
Ceci n’est qu’une proposition pour permettre aux personnes envoyées à la retraite d’être toujours en activité. Elle aura sans doute besoin d’être mûrie et améliorée.
En conclusion je pense qu’il faut supprimer la retraite pour se débarrasser des maux qu’elle engendre. La retraite est d’autant plus injuste et antisociale qu’elle provoque une cessation définitive de travail et une mise au rebut du retraité sans aucune perspective heureuse. Refuser le besoin de travailler à des personnes encore aptes me paraît très absurde. Même aux retraités actuels souhaitant travailler, il faut songer à donner la possibilité de travailler.
Merci pour votre attention.
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