2012-06-10

Conduites Anti-Progrès des Salariés du Bénin

L’exercice des fonctions professionnelles au Bénin est caractérisé par des conduites négatives qui m’ont frappé et qui interpellent les personnes ayant véritablement un réel désir d’une amélioration de la situation. L’envie d’une étude sur ces comportements m’a conduit à collecter des informations, à observer des faits et gestes entre 2006 et 2008; à titre personnel. Cette étude bien qu’incomplète n’en révèle pas moins les raisons de la léthargie d’un pays comme le Bénin.

Scènes sur le lieu de travail

Tout de suite je vous informe que je suis arrivé à la triste conclusion que le Béninois ordinaire est paresseux, fainéant et travaille à peine cinq (05) heures par jour; et c’est par gentillesse que je dis cinq heures sinon je dirais entre trois heures et demi (03½) et quatre (04) heures.

Voyons ça de plus près. Comment commence déjà une journée de travail classique de la majorité des Béninois? Eh bien, elle commence… par le retard au service.

Naturellement, dirait l’autre.

En effet ce serait faire défaut à sa nature de Béninois que de ne pas aller au bureau en retard. Car un vrai Béninois va au bureau en retard. OK, d’accord j’ironise mais c’est tout comme si je n’ironisais pas.

Tout se passe comme si chaque salarié béninois a son heure, propre à lui. Il y a des gens qui jusqu’à 9h ne sont pas encore au bureau; d’autres se rendent au travail à 10h. J’ai même vu des gens aller au service aux environs de 11h sinon après. SVP, souventes fois; qu’on ne vienne pas dire que c’est une fois en passant. Vous pouvez faire vos propres investigations, si vous avez le cœur à ça: vous choisissez une structure, par exemple la Sobémap ou la SBEE ou le CCIB ou la HAAC ou la préfecture ou que sais-je, et vous vous pointez là à sept heures tapantes; vous vous mettez de l’autre coté de la voie et vous observez. Vous le faites sur une durée de un (01) mois et vous allez voir.

Une fois le Béninois arrivé au service en retard il ne va pas se presser pour aller à son poste sans s’arrêter pour dire bonjour par ci et par là et parfois passer de bureau en bureau pour dire bonjour aux collègues et papoter un peu. Il arrive aussi qu’au service des gens se lancent dans de longues discussions qui n’ont rien à voir avec le travail, surtout les discussions politiques. Même durant l’exécution des tâches, le travail est régulièrement entrecoupé de pauses-discussion. Quand un chef reçoit un appel et quitte son poste, il n’est pas impossible que ce soit pour aller bavarder. Et ça peut aussi bien être à son lieu de travail que dans une autre structure/société.

À partir de 10h on assiste à quelque chose: on voit les gens sortir à un rythme indéfini, soit un à un, soit par groupe de deux ou trois; pour aller manger. Il y a des gens qui vont boire la bouillie, d’autres qui vont manger de l’igname, du riz, de la pâte… D’autres prennent le petit-déjeuner dans les bureaux où déambulent des vendeuses de sandwiches. C’est le plus souvent le cas des chefs qui parfois envoient leurs subalternes leur acheter à manger à l’extérieur. C’est sans surprise que vous verrez des bols de tout genre dans les bureaux. Cet arrêt de travail pour la prise de petit-déjeuner peut prendre vingt (20) à trente (30) minutes ou plus.

Un autre phénomène que j’ai observé concerne une revue de presse (en fon, une langue du pays) qui je crois bien était à ses débuts. Je suis de ceux que cette émission laisse indifférents mais j’ai constaté qu’elle avait pour effet de faire cesser le travail des fonctionnaires. Les gens arrêtent carrément le travail pour écouter cette revue de presse. Et c’est là où je me questionne sur les patrons de media pour me demander s’ils ont conscience de ce que créent leurs différentes émissions. Dans des pays sérieux on réalise des études: enquête d’audience, habitude d’écoute (ce genre de choses) pour élaborer, réviser les programmes télé et radio. Le font-ils? Je ne crois pas. Je ne sais pas si cette revue de presse continue toujours (j’écoute très rarement la radio). Si c’est le cas, est-ce que ça crée toujours la cessation de travail? Il faudra alors faire quelque chose.

Bon, après le petit-déjeuner et la revue de presse, on reprend donc le travail. La vendeuse d’oranges, de bananes, de ceci et cela va entrer en scène. Les gens qui sont intéressés vont en acheter. Tout ça a lieu dans les bureaux, hein. À partir de midi et avant même que 12h30’ ait sonné, qu’est-ce qu’on voit? Du coin de l’œil on s’aperçoit que des gens rangent leurs affaires pour rentrer à la maison. Il y en a qui ont déjà la tête baissée sur la table pour un petit somme; pas étonnant avec toutes les choses ingurgitées. L’organisme a besoin d’un peu de repos pour bien digérer toute cette nourriture.

Et voilà la demi-journée achevée. À quoi va-t-on assister dans l’après-midi? À peu près à la même chose. Ceux qui sont rentrés vont s’amener après 3h alors que le travail commence à 3h. Sur les coups de 4h-4h30’ on va sortir pour aller manger: bouillie, ignames et beignets, ou autres. Différentes vendeuses vont encore faire la ronde mais quand-même moins qu’au cours de la matinée. Avant 6h30’ la plupart des gens ont déjà rangé leurs affaires, d’autres ont même déjà quitté leur poste.

Irresponsabilité, paresse, tricherie, etc au cœur de l’administration béninoise

S’agissant du travail lui-même, on met souvent les tâches de côté pour s’adonner à d’autres plaisirs. Ainsi vous voyez des gens qui passent leur temps à jouer au solitaire. C’est l’application du système Windows la plus maîtrisée par les travailleurs au Bénin. J’ai assisté à une chose un jour; un matin, une femme arrive sur son lieu de travail. Elle s’assied et met l’ordinateur en marche. Dès que la machine a fini de démarrer, quelle est la première chose qu’elle exécute? Le solitaire! Quand je pense qu’un jour, courant 2005 je crois, j’ai reçu dans ma boîte e-mail une histoire, provenant de TechRepublic auquel j’étais abonné, qui disait qu’un employeur aux USA a renvoyé un employé pour l’avoir surpris en train de jouer au solitaire au bureau; je me dis qu’il faut qu’on se ressaisisse au Bénin. L’employé surpris a été licencié sur le champ sans autre forme de procès [car même s’il n’y a rien à faire au bureau, il y a toujours quelque chose d’autre à faire que de jouer au jeu solitaire].

Par ailleurs le Béninois typique qui est très versé dans la tricherie a une compréhension vraiment étonnante du travail qui l’amène à des comportements anormaux. Il se trouve des fonctionnaires qui créent leur propre business dans les structures où ils travaillent. On voit ainsi des employés qui sont des vendeurs de pagnes, d’arachides, de cacahouètes, d’acajous en bouteille, etc. qu’ils viennent vendre sur leur lieu de travail, pour leur propre compte. Il y a donc des personnes qui ne sont ni plus ni moins que des commerçants et l’administration est leur marché. Il n’y a certainement pas de mal à faire du commerce mais je crois qu’il faut être conséquent, sérieux, responsable, courageux. Si on veut faire du commerce, il faut démissionner et aller ouvrir une boutique pour faire son commerce. On saura que c’est ce que la personne fait et on ira dans sa boutique pour acheter ses marchandises. Mais au lieu de ça, on vient faire du commerce dans les locaux administratifs. J’ai connaissance d’un ex-fonctionnaire qui a fait un départ volontaire de la fonction publique pour se lancer dans une activité qui l’intéressait. C’est ça ce qu’il faut faire. Si ça marche, ça marche; si ça foire, ça foire. C’est à vous de voir. Mais le Béninois préfère tricher, et si on dit qu’il est un tricheur, ça le fâche. N’est-ce pas? Or c’est de la tricherie.

Page suivante >>>

Aucun commentaire: